À la tête de l’UTC depuis décembre 2022, Claire Rossi veut continuer d’engager son école vers une route déjà empruntée : celle de la transition écologique. Si jusque-là les démarches demeuraient louables mais désordonnées, la nouvelle présidente veut « piloter » et donner un véritable cap à ses équipes. Entretien.
Depuis votre investiture, il y a neuf mois, qu’est-ce qui a changé au sein de l’UTC ?
Dès que je suis arrivée, je me suis très rapidement penchée sur la signature de l’accord de Grenoble (un texte qui engage les établissements d’enseignement supérieur à prendre des mesures pour intégrer les enjeux de la transition socio-écologique dans leurs programmes et sur leurs campus, ndlr). C’est un chantier sur lequel j’ai pris du temps et mobilisé beaucoup de monde. Notamment les différents conseils, comme celui d’administration en toute fin de parcours. Finalement, nous avons pu présenter notre signature à l’accord pour 130 mesures sur les 180 proposées. Je reste très vigilante à ne pas tirer des plans sur la comète, c’est pourquoi je suis sûre que nous respecterons notre parole.
Nous avons aussi entrepris la création d’une direction « Transition écologique et engagement sociétal », effective depuis juin. Elle est pilotée par un service dédié qui intervient dans nos laboratoires et diagnostique aussi les performances de notre établissement. Nous allons prochainement refaire un bilan « scope 3 » des gaz à effet de serre que nous rejetons pour connaître nos points d’amélioration.
Que prévoyez-vous à l’avenir ?
Notre prochain chantier sera de créer un conseil du développement durable avec les étudiants pour discuter de nos évolutions futures. C’est important de les impliquer. Aussi, nous allons travailler à redéfinir nos thématiques transversales et stratégiques vers les sujets de la transition.
L’université technologique de Compiègne, qu’est-ce que c’est ?
Habituée aux premières places dans les différents classements d’écoles d’ingénieurs, l’UTC enseigne les méthodes de créations technologiques et responsables. Ici, dans les couloirs du campus isarien, les futurs ingénieurs en biologie et en procédés des matériaux transitent d’un amphi à l’autre. En véritable tuteur vers la vie professionnelle, l’UTC forme
les talents de demain avec conscience et rigueur. Nombreux sont les cas pratiques proposés aux élèves et qui profitent à la fois à l’école et à l’ensemble des acteurs locaux. « Ces projets sont suivis par des enseignants-chercheurs à l’écoute. Ils ont une bonne expertise et cela nous permet de progresser au mieux grâce à leurs conseils », nous confie un étudiant ingénieur en quatrième année. Lui a vu l’avènement du très ambitieux projet d’ombrière photovoltaïque sur le terrain de l’UTC. Nés d’une idée interne et conçus avec tout autant d’intimisme, ces panneaux solaires « made by UTC » trônent aujourd’hui fièrement aux abords de l’établissement. Ils servent à alimenter les bornes de recharges pour les usagers de voitures électriques du campus… gratuitement ! « Nos recherches pour une meilleure sobriété, nous nous les appliquerons à nous-mêmes », affirmait d’ailleurs Claire Rossi au moment de sa prise de poste en tant que directrice générale en décembre 2022. Quelques mois plus tard, la promesse semble être tenue !
Ce virage vert, vous le prenez aussi au quotidien jusque dans les locaux de l’UTC…
Bien sûr. La direction est toujours en train d’avancer pour essayer de répondre à ces questions de transition écologique. Je peux vous donner l’exemple de nos campagnes de sensibilisation contre la climatisation et le chauffage au sein de l’établissement. Pour tous nos travaux de rénovation, nous faisons en sorte d’utiliser des matières biosourcées.
Sur la formation, nous avons ouvert un enseignement socle commun à tous les étudiants ingénieurs de quatre crédits ECTS sur cette thématique écologique ainsi qu’une matière spécialisée pour chaque département. Au total, ce sont 40 % de nos recherches qui ciblent la transition écologique.
Quelle relation entretenez-vous avec la ville de Compiègne et les acteurs locaux ?
Nos étudiants sont souvent sollicités pour accompagner les transformations de la ville via des ateliers projets.En génie urbain, ils ont travaillé sur la nouvelle gare de Compiègne pour la rendre plus éco-conçue par exemple. Souvent, ils viennent nous voir pour des projets, la gestion de l’eau par exemple. En-dehors de la ville, nous avons aussi un lien très fort avec les entités locales. Nous sommes en ce moment sur un projet de recherche avec une clinique voisine à l’UTC pour mettre en place une dialyse verte qui économise l’eau.
L’UTC, c’est donc l’école des projets et du concret ?
Nos étudiants
en génie urbain
ont travaillé
pour la gare de
Compiègne. Ils
l’ont rendue plus
éco-conçue
Exactement ! J’aimerais que les entreprises ou les territoires pensent à nous en se disant que nous sommes capables d’évaluer et de régler des problèmes systémiques. Il y a la technologie, mais aussi le questionnement de la technologie. Je veux que les étudiants puissent anticiper les conséquences à long terme de leurs projets… et pour ce faire rien de mieux que de les confronter au réel. Par exemple, en ce moment, nous mettons en place un nouveau démonstrateur sur le campus. Il s’agit d’une serre connectée qui recrée une chaîne de transformation alimentaire. Elle sera équipée d’un méthaniseur sur site. D’ici deux ou trois ans, quand tout sera prêt, nous en ferons profiter notre épicerie solidaire. Voilà du concret !
L’ADN de l’UTC, c’est d’avoir une approche des problèmes, de la gestion des ressources et des bâtiments très large. Nous mettons à profit des entreprises nos laboratoires très technologiques. Ainsi, nous arrivons à faire en sorte que les avancées soient participatives entre les étudiants et les chercheurs sur des sujets qui nécessitent de progresser vite. C’est aussi de cette manière que l’UTC s’inscrit dans le concret.
Propos recueillis par Tanguy Patoux