Les maires face aux grands défis
Comme s’ils et elles n’avaient pas assez de responsabilités, les communes doivent désormais affronter les pénuries d’eau, les pollutions de l’air, les accidents climatiques, les catastrophes agricoles et autres investissements d’équipements électriques. Les EELV élus savent de quoi il retourne – du moins peut-on l’espérer. Les autres, indépendants ou membres de partis, doivent apprendre sur le tas les chantiers économico-écolos à lancer. Que les édiles le veuillent ou non, ils et elles doivent désormais piloter leur collectivité en écologistes. Donc, se former.
Même eux et elles. Le 31 août, Élisabeth Borne réunit toute son équipe gouvernementale pour bûcher « un peu » sur l’avenir de la planète. Ministres : à vos papiers, crayons, feuilles écolo-recyclées. Vous avez trente minutes, prenez des notes. Une demi-heure pour écouter sagement Valérie Masson-Delmotte, climatologue du Giec. Impact positif.
Trente minutes pour s’initier à la climatologie, c’est vraiment une formation express… La question est posée : nos élus devraient-ils faire l’objet d’une formation spécifique aux enjeux de l’écologie ? Les compétences très étendues qu’exercent les collectivités locales en matière de transition climatique réclament un savoir-faire certain. Qui ne se limite pas à quelques pistes cyclables, les communes savent faire. Plus qu’une simple sensibilisation, déjà nécessaire, le temps est venu de former nos élus à ces enjeux.
Solutions de mobilités, isolation des logements, espaces verts, ressources énergétiques, passage à l’économie durable, urbanisme responsable… Ce ne sont là que quelques-uns des champs d’action du maire, du président de conseil départemental ou régional. Il leur faut s’instruire plus pour agir mieux.
Mais comment faire ? D’abord, ouvrir davantage la politique aux savoirs scientifiques. Rapprocher son exercice du domaine de l’ingénierie. Adopter une culture pragmatique. Ce changement des mentalités, une révolution en France, s’avérerait salutaire. Il est proposé par l’Ademe. Cet organisme, reconverti en agence de la transition écologique, a déjà formé 5 185 élus lors de 398 sessions. Un catalogue de formations variées : adaptation au changement climatique, bâtiment, économie circulaire, industrie/économie, énergies renouvelables…
Autant d’univers qui concernent les maires au premier chef. Les pourcentages de satisfaction semblent réjouissants : 90,5 % en moyenne.
Une formation pour l’heure insuffisante
On rappellera également l’existence du Dife. Le quoi ? Le droit individuel à la formation des élus. En vigueur depuis 2017, à la destination de tous les élus locaux, il fonctionne un peu sur le modèle du désormais fameux MCF (Mon compte formation). Ici, le tout est géré par la Caisse des dépôts et consignations. Chaque maire de France dispose d’un compte (Mon compte élu) à activer en ligne. Son compte est crédité, chaque année, de 400 euros. Si les formations concernent aussi bien l’enjeu comptable que le continuum de sécurité, les formations au développement durable sont proposées en nombre. À nos élus, ensuite, de bien choisir leur formation selon leurs priorités.
Il n’y a qu’un malheur… Les représentants du peuple se forment peu : 95 % disposent de 700 euros ou plus sur leur compte formation. Ils n’utilisent guère cet outil mis à leur disposition. Pas assez connu ? Pas assez pratique ? Ceux qui s’y essaient le trouvent pourtant efficace.
La sénatrice Nicole Duranton (Eure) soulignait ce point, en séance publique, le 14 juillet : « Certains maires et présidents d’intercommunalité dénoncent l’absence de fond, de rattachement aux sujets “terrain” et de pertinence des contenus actuellement proposés. En particulier, les thèmes des transitions démocratique ou écologique semblent peu représentés. Dans les petites communes, peu d’adjoints et quasiment aucuns conseillers municipaux ne se forment […] Aujourd’hui, il n’est plus possible de délaisser ces aspects dans la formation des élus. Ils en sont, qui plus est, très demandeurs ! »
Vers la ville durable
France Ville Durable concentre l’essentiel de la réponse. Cet organisme public assez original regroupe aussi bien l’État, l’Association des maires de France, les entreprises concernées et les experts de la ville. Un lieu unique d’échanges et de débats autour de l’urbanisme et la façon de « penser la ville » pour mieux la faire. Sa boîte à outils regroupe tout à la fois formations et référentiels. Un guide utile pour se retrouver parmi la pléiade d’acronymes : LU, Padd, Scot, Sraddet, HQE, PPRI… Sans oublier le petit nouveau : le PCAET (Plan climat air énergie territorial) – lui-même intégré dans le PDM (Plan de mobilités). Vous suivez, n’est-ce pas ? Un aperçu, en une phrase ou deux, de la complexité du travail de l’élu…
Sébastien Maire, le bien nommé délégué général de France Ville Durable, indique ainsi dans une entrevue à La Gazette des Communes : « Rénover, réhabiliter, entretenir, réparer, optimiser et maximiser les usages de l’existant en mutualisant constituent pourtant des actions bien plus vertueuses pour répondre à l’urgence climatique… et pour les finances publiques. » On ne peut qu’approuver.
Valentin Gaure