Une partie des 10 millions de tonnes de nourriture gaspillées chaque année en France à domicile relèvent d’une mauvaise appréciation des dates de péremption: « consommer jusqu’au » ou « consommer de préférence avant »… Certains produits affichent une date limite de consommation et d’autres une durée de durabilité minimum. Trop complexe et mensonger. On jette du parfaitement consommable.
En Grande Bretagne, les supermarchés Waitrose viennent de retirer les dates de consommation recommandée sur près de 500 produits, en particulier des fruits et légumes sous emballage. Intention: lutter contre le gaspillage et inviter les clients à faire preuve de jugement. Déjà, en 2018, Tesco avait supprimé les dates de préremption et de consommation recommandée sur une centaine de produits. Plus récemment, Marks and Spencer avait fait de même sur 300 références. Morrisons, la quatrième plus importante chaîne de supermarchés du Royaume-Uni a supprimé cette année la date limite de consommation sur le lait. Le client est appelé à sentir le contenu de la bouteille pour savoir s’il est toujours consommable! Bonne idée. Les ménages britanniques jettent chaque année 4,5 millions de tonnes d’aliments comestibles par l’humain. Les foyers français 5,5 millions (chiffres Ademe).
DLC, DDM, pas touche…
Du côté européen et surtout après le Brexit, l’initiative britannique est observée avec scepticisme. Au titre du droit à l’information du consommateur, l’Union européenne reste vigilante sur les indications des produits. La date limite de consommation (DLC) est dite « sanitaire ». Au-delà, consommer le produit induirait des risques sur la santé. On la trouve sur les denrées périssables à conserver au frais (viandes, poissons, œufs, produits laitiers, charcuterie, plats cuisinés, salades composées, jus de fruits frais…) La date de durabilité minimale (DDM), elle, s’appose sur les produits secs, stérilisés ou déshydratés de conservation longue (gâteaux secs, boîtes de conserve, purées, jus, sauces…) Elle est indicative. Passée cette date, le produit pourrait perdre certaines qualités nutritives et gustatives. Déjà, la DDM n’est plus obligatoire sur certains produits à la durée de vie longue (sucre, sel, huile, vinaigre…).
Et l’on pourrait élargir encore sa suppression à d’autres produits comme les pâtes, le riz, les céréales et les fruits et légumes emballés. Mais il sera compliqué de se passer totalement de ces dates de péremptions et en particulier les dates limites de consommation qui répondent à une exigence de sécurité sanitaire. Il est bien évident que la date de fabrication doit être mentionnée, au titre du droit à l’information du consommateur.
Goûtez avant de jeter!
Mais Too Good To Go, une organisation qui se mobilise contre gaspillage alimentaire, appelle à mieux différencier les dates de péremption sur les paquets. Elle propose par exemple de rajouter après « à consommer de préférence avant… » la mention « mais toujours bon après ». Le tout accompagné par un pictogramme invitant le consommateur à faire appel à ses sens: « Goûtez, sentez, observez. » Histoire de se faire lui-même une idée de l’opportunité ou non de manger le produit. Refaire appel aux manières qui étaient celles de nos grands-parents lorsque ces dates de consommation n’existaient pas sur les emballages! Dans un contexte d’urgence climatique qui appelle le changement, nos comportements alimentaires doivent répondre à une pédagogie de la durabilité et revenir à une écologie humaine de bon sens!
Par Ezzedine El Mestiri