La transition du système énergétique français est engagée. Et les objectifs sont affirmés : réduction des émissions de gaz à effet de serre et de l’exploitation des énergies fossiles, notamment au profit du déploiement des énergies renouvelables et, au passage, de l’indépendance et de l’efficacité énergétique française. La « croissance verte », via une transition énergétique assumée, se fera sur le long terme. Mais une chose est sûre : le temps de la domination sans partage des énergies fossiles puis de l’énergie nucléaire est révolu. D’abord parce que la France, aux côtés de la majorité de la communauté internationale, s’est engagée à contrôler son empreinte carbone (objectif d’une minoration de 40 % des gaz à effet de serre pour 2030).

Pas une mince affaire, tant le secteur de l’énergie pèse lourd : 2 % de la valeur ajoutée en France, 43,1 milliards d’euros dans le déficit commercial en 2021 et une production énergétique qui a triplé depuis le lancement du programme nucléaire français (de 514 TWh en 1973 à 1 423 TWh en 2020, 1 TWh représentant un milliard de kilowattheure). Sur cette période, le nucléaire s’est imposé comme la source d’énergie phare. Et pour cause, le nucléaire représentait en 2020 67,1 % de la production totale d’électricité en France. Un total qui représente malgré tout le niveau le plus bas depuis 1993, après une baisse de 11,6 % par rapport à 2019. Le reste de la répartition de la production d’électricité : hydraulique (13 %), éolien (7,9 %), thermique fossile (7,5 %), solaire (2,5 %) et bioénergies (1,9 %).

Énergies fossiles, déclin programmé

Si les énergies fossiles sont loin d’être majoritaires dans la répartition de la production, elles restent très présentes dans le « bouquet énergétique primaire » ou « mix énergétique », la consommation d’énergie en France. Selon l’édition 2021 des Chiffres clés de l’énergie publiée par le ministère de la Transition écologique, elles sont même encore prépondérantes, avec au total 47,2 % de la consommation énergétique. Le détail : 28,1 % pour le pétrole, 15,8 % pour le gaz naturel, 2,5 % pour le charbon et 0,8 % pour les déchets non renouvelables.

Le reste du « camembert » de la consommation d’énergie primaire en France est complété par le nucléaire (40 %) et les énergies renouvelables (12,9 %), dont la biomasse solide (4,4 %), l’hydraulique (2,4 %), l’éolien (1,6 %), les biocarburants (1,3 %), les pompes à chaleur (1,3 %) et d’autres sources (1,9 %). Un mix énergétique loin d’être figé et amené à changer de paradigme dans les vingt prochaines années. À commencer par l’objectif annoncé à tout va de réduire de 30 % l’utilisation des énergies fossiles dès 2030. Il s’accompagne de l’ambition de porter les énergies renouvelables à 32 % de part dans le mix énergétique en 2030. Des étapes de passage posées par la loi sur la Transition énergétique de 2015, laquelle vise la diversification du mix au profit d’un modèle durable et respectueux de l’environnement, notamment grâce à un investissement annuel de 5 milliards d’euros pour les énergies renouvelables.

L’inévitable, et désormais quasi incontestable, déclin accéléré des énergies fossiles ne date pas d’aujourd’hui. Au gré de la montée en flèche du nucléaire depuis les années 1970, le fossile recule. Depuis 1990, la consommation de pétrole en France a chuté de 17 %. Et les stratégies bas carbone se multiplient : la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) 2019-2028 prévoit une baisse de 20 % de la consommation d’énergies fossiles en 2023 et de 35 % en 2028 par rapport à 2012. Pour satisfaire à ces objectifs, plusieurs solutions. D’abord, la sobriété énergétique car, comme on l’entend, l’énergie la moins chère et la moins polluante c’est celle qu’on ne consomme pas. Ensuite, le transfert vers des sources d’énergie moins carbonées et de l’électricité décarbonée (solaire, éolien, biogaz et nucléaire).

Révolution énergétique en vue

Le grand défi de l’énergie, aujourd’hui et demain, sera celui de l’alternative et de l’économie énergétique. Pour que les énergies fossiles poursuivent leur déclin massif et pour obéir à une stratégie énergétique décarbonée, les sources idoines, du nucléaire au renouvelable, doivent devenir de véritables sources de remplacement des parts du fossile, et non pas seulement du surplus en énergies. En France, les sources non fossiles sont déjà majoritaires, quand le mix énergétique mondial reste dominé à près de 85 % par pétrole, charbon et autres gaz.

Les solutions d’avenir des énergies françaises passeront par l’essor définitif des énergies renouvelables – dont la production est en progrès de 70 % depuis 2005 –, mais aussi par la progressive fin de l’ère du tout nucléaire. S’il ne s’agit pas de sortir complètement du nucléaire, la source d’échauffement atomique de l’eau pressurisée transformée en vapeur pour faire tourner des turbines – ce que sont des « centrales nucléaires », pas plus –, sera naturellement amené à décliner, à mesure que les énergies renouvelables progresseront. De façon à ne plus dépendre à ce point d’une source d’énergie qui divise son monde. Avec aujourd’hui 56 réacteurs à eau pressurisée répartis entre 18 centrales, une capacité de près de 61,4 GW (gigawatts) et une production électrique de 335,4 TWh (térawatt-heure) en 2020, le parc nucléaire français est le deuxième plus important au monde en termes de puissance, derrière les États-Unis.

Autant dire que l’impulsion à donner au nucléaire français, dont plusieurs réacteurs dépassent leur 40e année d’exploitation, est un débat permanent (lire ci-contre). La loi Énergie-climat de 2019 n’en a pas moins fixé comme objectif de porter à 50 % la part de l’énergie nucléaire dans le mix de production électrique français à l’horizon 2035. Dans le même temps, les énergies renouvelables grimpent et grimpent encore, malgré des résultats légèrement en deçà des ambitions de la loi relative à la Transition énergétique pour la croissance verte de 2015. C’est certain, l’énergie française de demain aura le teint « vert ». Et un style atomique plus discret ?

Adam Belghiti Alaoui

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