Qui ? BIS Boutique Solidaire

Quoi ? Un acteur parisien de la seconde main qui oeuvre à la réinsertion de publics précaires.

Rémi Antoniucci est un entrepreneur différent. Vraiment original. D’abord pour sa faconde, son bagou, qui tranche avec la langue de bois d’usage. Mais aussi et surtout pour le concept – ô combien précurseur – qu’il décida de lancer en 2012. Bien avant la mode et la tendance de fond de la seconde main, désormais très en vogue en raison du duo infernal inflation-climat ; Rémi Antoniucci transforme dès 2012 le marché du vêtement d’occasion.

« Seconde main, seconde vie, second souffle »

Avec BIS Boutique Solidaire, c’est l’adieu aux friperies certes sympathiques mais parfois peu engageantes, qui font toujours un peu fourre-tout. Avec ses quatre boutiques parisiennes, il veut donner à la seconde main l’allure de la première. Ses pièces sont en parfait état, résolument haut de gamme. Et c’est vrai qu’à première vue, grâce à la mise en valeur hors du commun des pièces, tout semble neuf et engageant. Vous voilà dans une ambiance d’achat finalement assez proche du Comptoir des Cotonniers par exemple. Antoniucci précise : « on veut faire de l’hyper-charté ».

Antoniucci est aux premières loges de l’évolution d’un marché. En 2012, la seconde main haut de gamme séduisait des clients en quête de vêtements qualitatifs, issus des grandes marques, mais proposés à des prix cassés. En bref, il s’agissait de faire une affaire. On retrouvait assez peu cette conscience écologique qui est aujourd’hui le premier réflexe de ses clients. Beaucoup d’ailleurs n’achètent plus que de la seconde main, décidés à en finir avec le modèle destructeur de la « fast-fashion ». « Il y a eu un considérable rajeunissement du marché, avec une envie de consommer mieux », ajoute ce fondateur décidément prescripteur.

Ce formidable travail au service des précaires

Intéressant parcours que celui de Rémi Antoniucci, qui après des études très sérieuses et peu virevoltantes de droit administratif, puis de premiers postes dans l’agro-alimentaire, s’est reconverti dans la mode, domaine qui lui faisait de l’oeil depuis longtemps.

Il faut ajouter qu’au-delà d’un caractère vertueux sur le plan environnemental, BIS Boutique Solidaire est également mieux-disant sur les questions sociales. L’épithète final de la marque prend aussitôt tout son sens. En effet, BIS Boutique Solidaire mène un travail considérable au service de l’inclusion. Ainsi, c’est plus de 400 personnes en difficulté qui ont été salariées et accompagnées par la marque ces dix dernières années.

Une cinquième boutique va bientôt voir le jour

Plus surprenant encore : 80 % de ces salariés ont pu retrouver un emploi dit « classique » au terme de leur passage chez BIS Boutique. Réfugiés, femmes victimes de violences, décrocheurs… Sur la cinquantaine d’emplois de l’entreprise, trente sont dévolus à ces publics hier en déshérence. Rémi Antoniucci se souvient de parcours hors du commun, comme celui de ce salarié afghan qui ne parlait pas un mot de français à son arrivée, de cet autre, ayant quitté sa yourte mongole pour se retrouver soudain dans le Paris branché de la mode.

La marque bénéficie d’une délégation de service public, preuve de son utilité reconnue. Malgré son oeuvre salutaire, BIS Boutique demeure une entreprise presque comme les autres, dépendant à seulement 12 % des subventions publiques. Rémi Antoniucci voulait fonder une entreprise qui lui ressemble : et quelle réussite ! La preuve, un cinquième point de vente ouvrira ses portes début 2024, pour continuer à mailler le territoire parisien. Voilà décidément un exemple remarquable d’économie sociale et solidaire.

Valentin Gaure

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