Mode, téléphonie, luxe, ameublement… tous les secteurs se mettent à la seconde main ! Zoom sur une pratique vraiment responsable ?
Phénomène devenu mondial, la seconde main est partout. Porté par l’industrie de la mode, pionnière dans le domaine, le secteur de l’occasion connaît un réel engouement depuis quelques années. Dans une optique de consommer mieux et de manière plus durable, de nombreuses personnes se tournent vers ce système qui consiste à utiliser un produit qui a déjà été utilisé. L’exemple le plus probant reste celui des vêtements d’occasion. Avec l’explosion de l’application Vinted qui met en relation des vendeurs et des acheteurs, le marché de la seconde main a connu un boost remarquable. Il est devenu le premier site marchand textile en France concurrençant même les géants du secteur tels que Zara ou Shein. Une alternative à la fast-fashion qui répond aux problèmes écologiques en limitant le gaspillage et en favorisant le recyclage. Mais c’est un domaine qui séduit également par ses avantages économiques. Au point que de nombreux autres secteurs tels que les jouets, les meubles, la high-tech ou même le luxe se sont lancés dans la course.
Une Pratique qui Séduit
La seconde main est devenue en quelques années un business à part entière. Si l’objectif était avant tout de favoriser les pratiques de consommation plus vertueuses, aujourd’hui d’autres enjeux rentrent en compte. Le pouvoir d’achat fait partie entre autres des raisons pour lesquelles les Français se sont tournés vers le marché de l’occasion. Avec les prix cassés qu’offrent les produits reconditionnés beaucoup y trouvent leurs comptes. En effet, selon une étude du cabinet d’études marketing et innovation, Enov, 2 acheteurs d’occasion sur 3 veulent avant tout faire des économies. Une motivation qui serait même en nette progression au vu du contexte inflationniste et de la baisse du pouvoir d’achat des Français. Le militantisme écologique arriverait ainsi en second plan. Une tendance positive qui s’est rapidement tournée en un business rentable. Certains se sont même spécialisés dans l’achat et la revente sur les sites tels que Leboncoin où les objets peuvent se vendre, se négocier et s’acheter entre particuliers. Une aubaine pour des Français qui souhaitent boucler leurs fins de mois. Mais aussi les magasins de mode (comme Kiabi ou La Redoute), d’ameublement ou d’électroménager qui proposent des offres réduites pour certains objets déjà utilisés.
Un Marché en Plein Essor
En France, le marché de la seconde main connaît un essor exponentiel encouragé par la crise sanitaire. Toujours selon l’étude d’Enov, en 2024, le marché de l’occasion pèse 7 milliards d’euros en France et 72 % des Français ont acheté un produit d’occasion au cours des 12 derniers mois en hausse de 8 points depuis 2021. Les plus adeptes des produits d’occasion sont les 25-44 ans et les familles et notamment les mères de famille. L’économie circulaire est désormais au centre des enjeux actuels et constitue désormais un pilier essentiel du commerce. Le marché reste dominé par le c to c, la vente entre particuliers via des plateformes spécialisées comme Vinted ou Leboncoin. Les vêtements représentent 47 % du marché, arrivent ensuite les produits culturels (46 %), les meubles (38 %) et les jeux (27 %). La télévision et les autres produits high-tech ne dépassent pas la barre des 20 %, selon Enov. Une consommation qui ne faiblit pas puisque 46 % des consommateurs ont augmenté leurs achats d’occasion depuis 1 an et 44 % pensent encore augmenter leurs achats.
Quel Impact Écologique ?
Une démarche vertueuse sur le papier mais pour quel impact ? L’univers de la mode et notamment de la fast-fashion représente l’une des industries les plus polluantes au monde. En effet, c’est le processus de fabrication et les fibres utilisées qui sont à l’origine de nombreux dégâts environnementaux comme le polyester qui est fait à partir de pétrole. Et qui émet beaucoup plus de que le coton par exemple. Sans compter le transport. Selon l’Ademe, le secteur du textile génère 4 milliards de tonnes de par an. De ce constat, que peut faire la seconde main pour améliorer et changer la situation ?
La seconde main prône la durabilité et la limitation du gaspillage avec notamment le concept de la réutilisation d’un bien. Dans les chiffres, cette alternative permet par exemple, de réduire les émissions de 77 % à 91 % lors d’un achat d’un smartphone déjà utilisé, par rapport à un produit neuf. Mais permet aussi de réduire la demande de nouvelles productions, ce qui diminue la pression sur les ressources naturelles. De l’autre, les collectes de vêtements ou de produits permettent d’éviter les transports et aussi les emballages et donc de diminuer l’empreinte carbone.
Une Fausse Promesse Vertueuse ?
La seconde main est-elle vraiment la bonne idée pour contrer la surconsommation et la pollution ? En réalité, le secteur promet une amélioration voire un changement dans les modes de consommation. Consommer mieux et à bas prix. Mais dans les faits, même si cela permet en partie de réduire les émissions de gaz à effet de serre, cela ne règle pas le problème. Tant qu’il y aura des magasins de fast-fashion ou même d’ultra fast-fashion, qui ne resteront pas encadrés par des prérogatives écologiques, l’impact de la mode sur la planète restera le même. Il va de même pour les produits d’électroménager, de high tech ou d’ameublement. Les réglementations autour de la reprise d’un objet et de sa réutilisation restent peu existantes. Pire que cela, les plates-formes imaginées pour répondre aux enjeux climatiques et sociaux actuels pousseraient à la surconsommation.
Vinted pourrait dans les années à venir remplacer le prêt-à-porter neuf. Sauf que la plate-forme soutient l’achat et la vente de vêtements et de fait insuffle la même dynamique d’achat compulsif que dans les magasins de prêt-à-porter. Sans compter, les émissions de gaz à effet de serre qui sont émis par le transport et la livraison des colis, car l’application est également présente dans certains pays d’Europe. Ce mode de consommation favoriserait aussi l’effet rebond qui correspond à l’augmentation en général, des comportements d’achat dû notamment à la baisse des prix. Le secteur de la seconde main pourrait s’inscrire donc dans la continuité de la fast-fashion avec l’idée de revendre un bien pour en acheter un autre neuf ou presque jamais utilisé.
Clara Seiler








